Revue Archéologique de Picardie n° 3/4 - 1 986

Le mobilier en bronze du sanctuaire de Digeon

par Françoise JOBIC

Depuis 1983, les fouilles du sanctuaire de Morvillers-Saint-Saturnin (Digeon) ont permis de mettre au jour une quantité non négligeable d'objets divers.

Avec la découverte d'un nombre important de monnaies gauloises (étude en cours) qui conférait déjà au sanctuaire un caractère très particulier, il paraissait nécessaire d'analyser le petit mobilier afin de comprendre davantage, à la lumière de ces objets, à quel type de sanctuaire nous avions affaire.

En l'absence de comparaisons régionales, le sanctuaire de Digeon se révèle un excellent tremplin pour élaborer quelques hypothèses de recherches envisageables sur les fouilles de sites à venir. En effet, au-delà des plans, le mobilier semble bien être l'élément de tout premier ordre qui permettrait d'établir, entre autres, une certaine typologie et une connaissance plus approfondie de ces lieux de culte.

Hormis la céramique, les monnaies, les éléments en fer, le petit mobilier comporte des objets en bronze pour la majorité, en verre, en plomb, en os travaillé et en pâte de verre pour les principaux matériaux.

Les fibules en bronze

Si la présence de fibules sur le sanctuaire n'est pas surprenante, puisqu'elles constituent le lot d'offrandes habituellement découvert sur ces types de sites, leur abondance est un fait remarquable. Effectivement, près d'une centaine de fibules a déjà été recueillie au terme de ces trois ans, alors que la fouille n'est pas achevée.

La majorité des fibules s'intègre parfaitement dans la typologie déjà connue. Les types à ressort sont présents pour une bonne moitié, qu'il s'agisse de quelques exemplaires provenant du style de La Tène, de fibules de Nauheim, des variantes filiformes et des types dits «à plaquettes latérales». La morphologie indique l'usage fréquent de corde externe dans la fabrication du ressort, qu'on retrouve également sur des sanctuaires voisins (Ribemont-sur-Ancre, Vendeuil-Caply). Certes, cette fabrication est connue ; elle semble cependant plus systématique dans cette région.

Des types à queue de paon ont été découverts ainsi que ceux à charnière représentés notamment par un nombre important de fibules de types d'Aucissa et dérivés d'Aucissa. Enfin, les types à charnière située au dos de l'arc figurent également dans cet inventaire (voir PI. l-ll-lll).

L'énumération est ici incomplète, mais l'ensemble des types et leurs variantes n'est pas minime. Certains sont cependant absents, mais les fouilles n'étant pas achevées, il n'est guère possible de conclure pour l'instant.

En ce qui concerne la chronologie, les fibules de bronze couvrent une période allant de La Tène finale au IIe siècle après J.C.

Quatre phases peuvent être distinguées :

- une phase de La Tène finale à Auguste, période de la Conquête,

- une phase essentiellement augustéenne,

- une phase plus particulièrement marquée sous Claude-Néron,

- une phase allant de la deuxième moitié du Ier siècle après J.C. au début du IIe siècle après J.C.

Des fibules symboliques

Une découverte particulièrement remarquable est la présence de simulacres de fibules.

Il s'agit de fibules non fonctionnelles, fabriquées dans de la tôle de bronze très mince. Tous les éléments inhérents au fonctionnement sont représentés. Plusieurs sortes de fabrications se distinguent, soit par le style, soit par la dimension, soit par le système de fermeture.

Un groupe est représenté par deux fibules de petites dimensions, toutes deux fabriquées dans une mince plaque de bronze dont la partie supérieure est enroulée sur elle-même afin de constituer l'ardillon. Cette partie est légèrement repliée. L'ardillon passe sous ce repli puis longe un bord de l'arc, créant ainsi une élasticité précaire. L'arc est plat et sans décor. Le porte-ardillon n'est qu'un simple repli d'un bord latéral de la zone inférieure.

Si l'une des fibules a bien le porte-ardillon et l'ardillon du même côté, l'autre, au contraire, possède ces éléments opposés l'un à l'autre. Cette «erreur» de positionnement, la fragilité du matériau ajoutée à l'irrégularité de l'ardillon, qui né peut qu'endommager une étoffe, démentrent donc une impossibilité de fonctionnement (voir n° 24-25 planche IV).

Une autre fibule illustre le même système de fermeture sur une forme générale différente. La tôle de bronze est découpée de manière à créer une partie supérieure carrée et une partie inférieure rectangulaire, l'ensemble pouvant s'appeler «arc». Celui-ci est plat et lisse. Du milieu de la zone supérieure, un surplus de tôle a été prévu et enroulé sur lui-même comme pour la fabrication des ardillons précédents. Cet «ardillon» est replié vers le centre. De nouveau, le porte-ardillon est un simple rabat de la partie inférieure (voir n° 26 planche IV).

Un exemplaire présente un système de fermeture à charnière complet.

Il s'agit d'un petit rectangle découpé dans une plaque de bronze, ici, l'arc est courbé, volontairement semble-t-il. Le système de charnière est constitué d'un ardillon et de sa butée fabriqués à part. La butée est percée d'un trou dans lequel coulisse un axe préalablement découpé. L'axe est ensuite

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